Les modalités du développement stratégique

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III: Les stratégies d’impartition et d’intégration

Lorsque des entreprises s’associent tout en restant indépendantes, il s’agit de stratégies d’impartition. Lorsque au contraire elles se regroupent, il s’agit de stratégies d’intégration.

Durant les deux dernières décennies, la pratique des accords interentreprises s’est considérablement développée. Les contrats d’agrément, de franchise, de concession et de sous-traitance foisonnent.
Les accords interentreprises sont la plupart du temps des contrats commerciaux de distribution, c’est-à-dire des contrats qui ont pour objet de fixer les relations entre le fournisseur et le détaillant quant aux ventes à intervenir et quant aux obligations annexes des deux parties. La durée ne peut être supérieure à dix ans. L’avantage pour le concédant consiste à disposer d’un réseau de commerçants indépendants qui écoulent ces produits. L’avantage pour le concessionnaire consiste à pouvoir bénéficier des aides matérielles, techniques et publicitaires du concédant.

Ces accords peuvent également intervenir dans le domaine de la production. Le contrat de sous-traitance est, à cet égard, le plus répandu.

A- Les stratégies d’impartition

1 — La franchise

La franchise et la forme la plus récente est aussi la plus contraignante des contrats de distribution dans la mesure où elle implique l’intégration totale du franchisé à un réseau ainsi que sa soumission absolue aux techniques de vente du franchiseur.
La franchise se définit comme un contrat par lequel une entreprise concède à une autre entreprise indépendante, en contrepartie d’une redevance, le droit de se présenter sous sa raison sociale ou sa marque pour vendre des produits ou des services. La franchise s’accompagne généralement d’une assistance technique du franchiseur et d’une adhésion totale du franchisé au concept de vente mis en place par le franchiseur.
La technique de la franchise date de 1925 aux USA et est apparue en France sensiblement à la même époque. Aux USA, c’est la « General Motors » qui, la première, a mis en place un réseau de franchisés. En France, la « lainière de Roubaix » a développé son réseau de franchisés à partir de 1929 sous la marque « Pingouin-Stem ». Il faut toutefois attendre les années 1970 pour que se développe véritablement la franchise en France.

Il existe plusieurs types de franchise :

  • la franchise industrielle : — dans ce cas, le franchiseur est un industriel qui concède à un autre industriel un droit d’exploitation de sa marque et de son savoir-faire (Coca-Cola par exemple).
  • la franchise de services : — ici, le contrat se rapporte à la diffusion d’une méthode ou d’un savoir-faire (MacDonald ou Jean-Louis David par exemple).  Cette forme de franchise s’est très développée et représente aujourd’hui environ 40 % des points de vente franchisés
  • la franchise de production : — le franchiseur est un producteur qui commercialise ses produits dans des magasins qui exploitent sa marque et sa renommée ( Yves Rocher ou Benetton par exemple).
  • la franchise de distribution : — le franchiseur est ici un grossiste qui développe un concept et diffuse une collection qu’il a sélectionné auprès de fournisseurs ou qu’il a fait créer (Manoukian ou Pronuptia par exemple).

Quels sont les avantages et les inconvénients de la franchise pour le franchiseur et pour le franchisé ?

— Avantages et inconvénients de la franchise pour le franchisé.

  • Avantages:
    Tout d’abord, le franchisé reste propriétaire de son fonds de commerce et conserve son indépendance juridique (notons qu’il ne s’agit que d’une indépendance juridique et non commerciale !). Le franchisé bénéficie également de la notoriété d’une grande marque et du savoir-faire du franchiseur. Par ailleurs, il peut également bénéficier d’une aide à la création du commerce, d’une assistance en gestion et du soutien publicitaire et promotionnel du franchiseur.
  • Inconvénients:
    Sur le plan financier, l’exploitation d’une activité en franchise peut être assez coûteuse. Le franchisé est tenu à verser un droit d’entrée et une redevance proportionnelle au chiffre d’affaires. Ces droits d’entrée sont variables en fonction de la notoriété de l’enseigne et de la rentabilité prévisionnelle du point de vente. Par exemple, le droit d’entrée est de 100 000 F pour un Quick et de 150 000 F pour un restaurant « Tarte Julie ».  Ce droit d’entrée ne doit pas être confondu avec l’apport financier personnel qui couvre généralement une partie ou la totalité de l’investissement financier. Cela signifie que le franchisé doit également financer le commerce initial, procéder à des travaux d’aménagement, acheter les stocks, etc…. Le franchisé est, par ailleurs tenu au respect absolu du concept du franchiseur (politique prix, politiques promotions, aménagement des locaux, etc.) ainsi qu’à l’obligation souvent exclusive de s’approvisionner un auprès du franchiseur ce qui lui laisse relativement peu de liberté au niveau de la gestion de ses stocks. Le franchiseur exerce un contrôle sur la gestion du franchisé.

On voit donc que malgré l’indépendance juridique du franchisé, la franchise implique une dépendance commerciale totale du franchisé vis-à-vis du franchiseur.

 — Avantages et inconvénients de la franchise pour le franchiseur.

  • Avantages :
    Côté franchiseur, les avantages sont assez nombreux. Aucun investissement n’est nécessaire et le franchiseur se trouve « débarrassé » des problèmes relatifs à la gestion des points de vente. Il peut, par ailleurs contrôler totalement le circuit de distribution et percevoir des redevances de la part des entreprises faisant partie de son réseau de franchisés.La franchise est également un excellent moyen pour diffuser une marque sur une large zone géographique, ce qui permet ainsi une accélération de la notoriété
  • Inconvénients :
    Des conflits peuvent apparaître avec les franchisés. Par exemple, les franchisés de Copy2000 ont combattu pendant 5 ans leur franchiseur pour obtenir une diminution des redevances ( 9 % du chiffre d’affaires) qu’ils estimaient excessivement élevées (source : capital — mai 1994).
    Le franchiseur est également tenu à des obligations notamment celle de fournir une assistance technique et une assistance de gestion envers les franchisés ainsi que d’adapter les méthodes de vente et les produits aux évolutions du marché.

 — textes juridiques applicables à la franchise:

Depuis février 1989 la franchise n’est plus considérée comme une entente, des accords de franchise peuvent être conclus partout en Europe. En France, le contrat de franchise est réglementé par la loi Doubin du 31 décembre 1989. Cette loi impose désormais un document précontractuel comprenant des informations sur le franchiseur, sur la chaîne de franchise (nombre de franchisés, adresses, ancienneté), sur le marché, la situation actuelle de ce marché ainsi que ses perspectives d’évolution. Le document doit également comporter des mentions sur le contenu du concept ainsi que des informations sur les résultats de la chaîne de franchisés pour les deux derniers exercices comptables.

2 — La sous-traitance

Tout d’abord, la sous-traitance correspond à un choix économique de production qui consiste, pour un donneur d’ordre à confier totalement ou partiellement à une autre entreprise un certain nombre d’activités. La sous-traitance s’inscrit donc dans le cadre des politiques d’impartition.

Pour approfondir un peu cette définition, nous pouvons dire que, pour satisfaire la demande qui s’adresse à elle, une entreprise appelée « donneur d’ordre » peut sous-traiter (« acheter ») à d’autres entreprises appelées « sous-traitants » soit une partie de la production, soit certaines étapes de la fabrication. Le sous-traitant doit réaliser le travail conformément au plan et spécifications précisées par le donneur d’ordre dans un cahier des charges.

La sous-traitance est donc une forme de collaboration une peu particulière et elle présente les caractéristiques suivantes : .

  •  le sous-traitant a une garantie de débouchés (sauf si le donneur d’ordre est en difficulté).
  • la nature et les caractéristiques de la production du sous-traitant sont déterminées par le donneur d’ordres qui réalise les études dans ses propres services. Il précise au sous-traitant les spécifications du produit et les normes à respecter.
  • le donneur d’ordre exerce fréquemment un effet de domination sur le sous-traitant — très souvent, le sous-traitant n’a qu’un ou plusieurs clients dont chacun représente un fort pourcentage de son chiffre d’affaires. Si l’on considère également que l’activité du sous-traitant est très spécialisée (ce qui l’empêche de s’orienter vers d’autres débouchés), on ne peut être amené à constater la fragilité des entreprises qui sont dans cette situation. La sous-traitance est donc source de vulnérabilité.

Pour les grandes entreprises la sous-traitance permet de bénéficier d’une compétence technique spécialisée et d’accroître la souplesse du fonctionnement de l’entreprise.
De plus, la sous-traitance permet de remédier à des insuffisances de capacité, que ces insuffisances soient conjoncturelles, saisonnières ou occasionnelles. Le recours à la sous-traitance permet de conserver le marché et de respecter les délais.
La flexibilité du donneur d’ordre est améliorée par le recours à sous-traitance — cette dernière permet d’absorber les variations de la demande. Grâce à la sous-traitance, l’entreprise, tout en maintenant un potentiel de production fonctionnant toujours en plein-emploi, peut faire face aux pointes d’activité. Elle pourra ainsi reporter sur ses sous-traitants les coûts financiers et sociaux de certaines activités.
En bref, le recours à la sous-traitance améliore la flexibilité des donneurs d’ordre mais accroît la fragilité des sous-traitants.

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