Histoire du système monétaire international

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Cette institution internationale a détenant de l’or déposé par les états participants, aurait créé en contrepartie le BANCOR, une nouvelle monnaie scripturale. Chaque pays se verrait attribuer un quota de bancor en fonction de sa part dans les échanges internationaux. De cette manière, la croissance de la monnaie internationale devrait être proportionnelle à la croissance des échanges internationaux. Le BANCOR aurait donc permis les règlements internationaux et l’institution internationale aurait accordé aux états débiteurs des crédits sur des comptes en bancor. Par ailleurs, la « Clearing Union » aurait permis le maintien de la paix dans le monde grâce à l’arme du blocus financier. Keynes pensait finalement, qu’à tout point de vue, la supranationalisation du pouvoir monétaire pouvait permettre le maintien des grands équilibres.

Le plan Keynes a été rejeté et n’a, bien entendu, jamais été mis en application.

–L’analyse libérale :

Pour les libéraux, la monnaie internationale est un bien comme un autre. Le prix d’une monnaie ou son cours ne peut résulter que la loi de l’offre et de la demande. Dans une optique libérale, accuser les Américains, parler d’impérialisme du dollar relève d’une critique mal intentionnée. La conséquence logique de cette analyse de la notion de monnaie comme monnaie marchandise est de considérer qu’il est nécessaire de maintenir une grande flexibilité des taux de change, en d’autres termes de laisser flotter les monnaies (voir notion de taux de change flottants dans le chapitre précédent).

Les libéraux avancent un certain nombre d’arguments en faveur de leurs thèses :

Tout d’abord, le maintien de taux de change flottants élimine le problème d’un éventuel déficit de la balance des paiements. Le raisonnement consiste à dire que si un déficit se produit, la monnaie du pays est moins demandée pour les transactions commerciales et son cours va baisser. Cette dépréciation à accroître le prix des importations et réduire celui des exportations, la balance commerciale va donc automatiquement s’améliorer. Inversement, un excédent de la balance des paiements entraînera une hausse de la monnaie cette qui rendra les exportations plus difficiles — les exportations baisseront donc en volume et l’équilibre sera rétabli.

Par ailleurs, la spéculation ne doit pas être condamnée car les spéculateurs expriment des préférences en prenant en compte un certain nombre d’indicateurs économiques (politique des pays, niveau des prix, taux d’inflation etc…) Et contribue ainsi à garantir le réalisme des taux de change par rapport à l’économie réelle.

Enfin, la flexibilité des taux de change donne à chaque pays une plus grande liberté de manœuvre concernant sa politique économique et monétaire.

On constate donc que l’analyse libérale s’oppose totalement à l’analyse keynésienne — encadrement des politiques monétaires par une autorité supranationale pour l’analyse keynésienne — liberté totale de circulation des capitaux et déréglementation pour l’analyse libérale.

Au moment de la négociation des accords de Bretton-Woods en 1944, c’est finalement l’analyse libérale qui a prévalu. Le plan WHITE, du nom d’un financier américain, servit dans ses grandes lignes à élaborer les bases du système monétaire international. Ce plan écartait l’instauration d’une autorité supranationale ayant autorité sur les pays membres en matière monétaire. Le plan White n’envisageait que la création de simples organes de coopération volontaire.

II — Le contenu des accords de Bretton-Woods (juillet 1944)

Les accords de Bretton-Woods reposent sur trois principes essentiels :

  • Permettre la conversion libre des monnaies entre elles.
  • Permettre aux pays dont la balance des paiements est déficitaire d’obtenir des crédits.
  • Assurer la stabilité des taux de change donc la stabilité du commerce international.

A – L’instauration d’un système de parités fixes

Au moment de l’adoption des accords de Bretton-Woods en 1944 chaque pays avaient déclaré au FMI (fonds monétaire international créé par les accords) une parité de sa monnaie nationale par rapport à l’or et par rapport au dollar. Au 1er juillet 1944 un dollar était équivalent à 888,671 mg d’or soit approximativement à un gramme d’or. Une once d’or (31,1 grammes d’or) et qui valait à 35 dollars. Partant de là, les parités ont été fixées à plus ou moins 1 % par rapport au dollar. Les parités ont été portées à plus ou -0,75 % à partir de 1958 et ont été élargies à plus ou moins 2,25 % à partir des accords du Smithsonian Institute (1971).

Mécanisme :

Dans cet exemple, la banque de France devait intervenir sur le marché des changes pour maintenir le cours du franc à l’intérieur de la parité définie (plus ou moins 1 %). Si la première limite était atteinte la banque de France devait acheter des dollars contre des francs — si la seconde limite était atteinte la banque de France devait au contraire vendre des dollars contre des francs.

Autre caractéristique du système mis en place : une réduction de marge de manœuvre pour les pays concernant leur politique monétaire ainsi que la mise en place des DTS (Droits de Tirage Spéciaux).

Le recours à la dévaluation ou à la réévaluation n’est admis que pour la correction d’un déséquilibre fondamental de la balance des paiements. Il devient nécessaire de prévenir le FMI pour les modifications de moins de moins de 10 % par rapport à la parité choisie. Pour les modifications de plus de 10 %, une autorisation du FMI est nécessaire.

Les DTS ont été mis en place au moment de la réforme de 1976 à partir du moment où le dollar n’a plus été en mesure de s’imposer aussi universellement qu’autrefois. L’ambition des DTS était de remplacer l’or en tant qu’instrument de réserve. Les DTS étaient définis par rapport à un panier de monnaie. Les DTS permettait aux pays ayant besoin de régler des déficits de leur balance des paiements à faire appel au financement du FMI. Mais, les DTS souffraient d’une trop grande complexité d’utilisation.

B — la libre convertibilité des monnaies entre elles

Le principe de la liberté de convertibilité des monnaies entre elles impliquait la suppression de tout contrôle des changes. Toutefois, le FMI a toléré quelques exceptions à la règle pour les pays qui voulaient maintenir des restrictions sur les paiements et transferts relatifs aux opérations internationales courantes, à condition toutefois de consulter le FMI chaque année sur l’opportunité de maintenir de telles restrictions et surtout de s’engager à les supprimer dès que la situation de leur balance des paiements le permettra.

En 1944 le dollar est la monnaie n°1 et sert de monnaie de réserve dans les banques centrales. Les USA sont en effet en position de domination économique financière et, du fait qu’ils sont les seuls à pouvoir assurer la convertibilité immédiate de leur monnaie en or, ils bénéficient d’un privilège de non-intervention sur le marché des changes. En d’autres termes, il existe deux catégories de monnaies : le dollar et les autres !

On se trouve donc en quelque sorte dans un système d’étalon de change or (GES) mais avec un organisme (le FMI) chargé de superviser le fonctionnement d’ensemble du système et de faire respecter les parités.

III – L’évolution du système de Bretton-Woods

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’économie se caractérisait par un très important déséquilibre dans les échanges entre l’Europe et les USA. En effet, les besoins de l’Europe en biens d’équipement étaient énormes et ne pouvaient être satisfaits que par les USA. L’Europe était déficitaire — la balance des paiements américaine était au contraire « excessivement excédentaire ».

Le plan Marshall a permis à l’Europe de reconstituer peu à peu son potentiel productif — l’Europe a réussi une réduction spectaculaire du déséquilibre de ses échanges et ceci d’autant plus que l’on a assisté à de très nombreuses dévaluations européennes par rapport au dollar. La compétitivité prix des produits européens s’est améliorée et la situation s’est progressivement renversée. La balance des paiements européenne est devenue excédentaire (n’oublions pas les trente glorieuses !) et la balance des paiements américaine s’est détériorée.

À partir de 1958 la situation s’est aggravée pour les USA en raison principalement de leurs importantes dépenses militaires à l’étranger ainsi que des très importantes sorties de capitaux américains du aux investissements directs des entreprises américaines à l’étranger et surtout en Europe en raison des perspectives de profits élevés.

Il en résulte une perte de confiance dans le dollar – Il y a en quelque sorte une masse excessive de dollars par rapport à la part relative détenue en or. Le dollar deviendrait-il progressivement « une monnaie de papier », une monnaie inconvertible en or ?

Pour éviter que cette perte de confiance n’entraîne trop de mouvements spéculatifs sur l’or, les dix pays industriellement les plus puissants ont constitués en 1961 le «pool de l’or ». Aux termes de cet accord, les banques centrales des dix pays concernés devaient vendre de l’or contre des devises chaque fois que le cours de l’or dépassait 35,20 dollars l’once.

La spéculation n’a pas été enrayée, et, en 1968 le pool de l’or a été supprimé

En 1971, la balance américaine se dégrade à nouveau — l’inflation américaine est importante et les taux d’intérêt pratiqués sont inférieurs aux taux d’intérêt européens. La spéculation change de visage, elle s’effectue désormais sur le Mark et contre le Dollar. C’est la raison pour laquelle le 15 août 1971, le président Nixon annonça la suppression de la convertibilité du Dollar en or ainsi que la mise en oeuvre d’une politique de rigueur
aux USA. À la suite de cette décision, la quasi-totalité des pays décide de laisser flotter leur monnaie — les interventions des banques centrales se font rares — il devient nécessaire de réformer le système monétaire international.

Suite à ces événements, le 14 décembre 1971, aux Açores, Pompidou et Nixon organisent la rencontre des dix pays industriellement les plus développés. Cette rencontre aboutira à l’adoption des accords du Smithsonian Institute.

À la suite de ces accords une nouvelle grille de parités a été établie : les marges de fluctuation passent de plus ou moins 1 % à plus ou -2,25 %, toujours par rapport au dollar. Le dollar reste donc le centre du système monétaire international malgré sa dévaluation par rapport à l’or (le prix de l’once d’or passe de 35 à 38 dollars). Compte tenu de ces modifications, toutes les monnaies se trouvent réévaluées par rapport au dollar. En théorie, on devrait assister à une augmentation des exportations américaines.

Quel furent les conséquences de l’augmentation des marges de fluctuation et de leur passage à plus ou moins de 2,25 %.

Curieusement, cet élargissement a entraîné la naissance, le 12 avril 1972 (accords de Bâle) du serpent monétaire européen. Le serpent monétaire européen, destiné à assurer la stabilité des monnaies européennes entre elles, est considéré par beaucoup comme le premier pas vers l’Euro.

Explication :

L’élargissement des marges de fluctuation présentait de graves inconvénients pour les échanges commerciaux intra européens en raison du cumul des marges entre monnaies européennes. Examinons les choses un peu plus en détail en comparant la situation d’avant 1971 et celle d’après 1971 :

Avant 1971

  • Ecart instantané entre le Franc et le Mark : 2%
  • Ecart temporel entre les deux périodes =Ecart instantané x2 soit 4% L’écart est jugé tolérable et ne nécessite pas l’instauration d’un système propre à encadrer les monnaies européennes.

Après 1971

  • Ecart instantané entre le Franc et le Mark : 4,5%
  • Ecart temporel entre les deux périodes =Ecart instantané x2 soit 9%

On constate qu’après 1971 l’écart temporel passe à 9 %. Cet écart est beaucoup trop important et risque de porter préjudice aux échanges commerciaux intra européens. C’est la raison d’être du Serpent européen dont l’objectif initial (assurer la stabilité des monnaies européennes entre elles) n’a d’ailleurs jamais été atteint en raison principalement du premier choc pétrolier de 1973 et des difficultés qu’il a entraîné pour certains pays

LE SERPENT MONETAIRE EUROPEEN

Description :

  • Le dos du serpent représente la monnaie européenne la plus forte par rapport au Dollar.
  • Le  « ventre » du serpent représente la monnaie européenne la plus basse par rapport au Dollar.

Situation1  L’écart entre la monnaie européenne à plus forte (ici le Franc) et la monnaie européenne la plus faible(ici le Mark) est à son maximum : 2,25 %. Les banques centrales concernées ne doivent donc intervenir pour faire baisser la monnaie qui monte et redonner de la valeur à celle qui tend vers le bas. Par exemple, si le Franc est en haut et que le Mark est en bas, la banque de France doit vendre des Francs et acheter des Marks. Le cours du F baissera et le cours du Mark montera.

Situation 2 : Ici, l’écart entre les monnaies du serpent s’est rétréci mais l’accord exige que les banques centrales interviennent en vendant leur monnaie nationale contre du dollar pouvoir et apprécier celui-ci car les monnaies européennes ont trop monté par rapport à lui. C’est ce que l’on appelle « maintenir le serpent dans le tunnel ».

Situation 3 : Ici, l’idéal européen est atteint — la marge entre monnaies européennes est égale à 0 et leur position par rapport au dollar est bonne.

En pratique, le serpent n’a jamais fonctionné :

  • En 1973 la Grande-Bretagne quitte le serpent à la suite de l’effondrement de la livre sterling. Il en va de même pour l’Italie.
  • En 1974 la France redoute les effets de la hausse du pétrole et quitte le serpent.
  • En 1975 la France réintègre à nouveau le serpent.

Pour conclure, nous pouvons dire que depuis 1978 les monnaies sont entrées et ont quitté le serpent quand bon leur semblait.

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